PARTIE 2 / CHAPITRE 3 - Jean-Emmanuel rencontre ses coachs
"Seuls les morts voient la fin de la guerre… Seuls les morts voient la fin de la guerre.,. Seuls les morts voient la fin de la guerre…", se répétait Jean-Emmanuel, à la façon d'un mantra.
Depuis le ras de l'horizon, les deux soleils remplaçaient progressivement la nuit par l'ombre sur toute la jungle. Le gorille au crâne chauve, au ventre replet et aux petites lunettes cintrées avait mis une bonne heure pour monter depuis le camp du Syndicat jusqu'aux premiers arbres. Il imaginait cette première ascension comme un chemin de croix vers son propre Golgotha. Si dehors, tout était calme, au dedans de sa tête résonnait les brimades des Romains avec ce qu'il faut de larsen. Il arriva à l'orée de la jungle, et les soleils tout à coup lui dirent :
- Ce nouveau jour marque le début d'une nouvelle ère. À partir d'aujourd'hui, nous allons t'aider à retrouver qui tu cherches et pendant qu'on y est, t'apprendre ce que signifie une carrière réussie !
- Qui je cherche ?... Benoît? Je pourrais ramener Benoît par la peau des fesses jusqu'au camp du Syndicat ? (Jean-Emmanuel, recroquevillé sur lui-même, soufflait péniblement. Après un instant, il essaya de distinguer ce qui se cachait derrière les soleils, et dit :) j'ai déjà entendu cette voix quelque part… Vous n' êtes pas passé au camp pour faire une formation en début d'année ? Oui, je me souviens… Vous nous avez enseigné tout un ensemble d'indicateurs pour reconnaître dans un groupe le mâle dominant. Je vous avais adoré !
- …
- Heuuuu, répondez-moi s'il vous plaît ?...
- Mince, il est où, je l'ai perdu de vue.
- Tu crois vraiment que c'est le moment de plaisanter, Cassandre ?
Jean-Emmanuel rentra sa tête dans son cou, à la manière des tortues démissionnaires peuplant les 3 lacs du centre de la jungle. Des halos des deux soleils s'échappèrent deux silhouettes, qui prirent couleurs et reliefs au fur et à mesure que les yeux de Jean-Emmanuel s'habituèrent à la luminosité. Il y avait devant lui un chimpanzé aux orbites vides, aux gencives sales, et dont la tête semblait écorchée jusqu'aux joues, et un singe hurleur dont les pattes avaient été remplacées par du bois. Les soleils montaient vers le ciel. Et très vite, il fit complètement jour sur la jungle.
- Tais-toi Jean-Emmanuel ! Tais-toi, putain, ON PARLE ! dirent en cœur le singe hurleur et le chimpanzé aveugle.
- Vous connaissez mon nom ? Je ne sais pas par quel miracle… Mais, je suis honoré, honoré !
Jean-Emmanuel se rapprocha du curieux duo, le sourire aux lèvres et la main tendue.
- Du coup, bonjour bonjour, je suis Jean-Emmanuel, responsable d'unité au Syndicat. Ah oui, vous connaissez déjà mon nom, désolé je suis un peu nerveux. J'ai peu dormi cette nuit. Je pars à l'aventure, vous savez. Ah oui je vous l'ai déjà dit.
Le singe hurleur aux pattes de bois et le chimpanzé aux orbites vides se regardèrent. Le premier dit au deuxième :
- Cassandre, Cassandre… Pourquoi on nous envoie les cas les plus désespérés ? D'abord, il y a eu ce bonobo à la manque, puis lui…
- Tu exagères Hector. Le bonobo était pas mal. Volontaire, agile, vif. Il avait l'avantage de sa jeunesse. Lui, là… (Cassandre mis les deux doigts dans ses orbites vides, puis les dirigea vers la tête triste de Jean-Emmanuel. Puis balaya l'air devant son nez avec sa main). Bon, allez, si le rhinocéros le veut… C'est qu'un job après tout…
Hector se tourna vers le gorille chauve et suant :
- Oui, Jean-Emmanuel, bravo. C'est en effet vers Benoît que nous allons te conduire.
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